Oatly : La marque qui a déclaré la guerre au lait, en storytelling
Dans l’univers feutré des alternatives végétales, Oatly est un cri. Ironique, militant, un brin punk — mais surtout redoutablement aligné. Depuis ses débuts en Suède dans les années 90, la marque n’a cessé de déconstruire les récits dominants de l’industrie agroalimentaire pour mieux écrire le sien. Et si on ne retient qu’un message, c’est bien celui-là : Oatly ne vend pas seulement une boisson à base d’avoine. Elle vend une idée. Et elle le fait sans compromis.
Disrupter le lait (et les discours)
Quand la plupart des marques végétales cherchent à rassurer, à se fondre dans le paysage, Oatly choisit de secouer. “It’s like milk, but made for humans” — ce slogan, devenu viral, donne le ton. Derrière l’humour provocant se cache un manifeste : et si le lait n’était plus une évidence, mais une question ? Et si les vaches n’étaient plus les héroïnes silencieuses de nos petits-déjeuners ?
Dès sa refonte de marque en 2012 sous la direction créative de John Schoolcraft, Oatly opère un virage radical : refonte visuelle, ton de voix sarcastique, communication engagée. Fini les packagings neutres. Chaque briquette devient un manifeste imprimé. On y lit des paragraphes entiers, comme dans un fanzine militant. Le branding devient média.
Oatly ne fait pas que disrupter un produit. Elle disrupte une rhétorique.
Un storytelling de conviction
Ce qui rend Oatly remarquable, c’est cette capacité à tenir une ligne éditoriale aussi forte que clivante. Tout est assumé. Tout est signé. Même les controverses sont intégrées à la narration : en 2020, lorsqu’un partenariat avec un fonds controversé déclenche une vague de critiques, la marque choisit la transparence… à sa manière. Une campagne nommée « F*ck Oatly » recense les critiques reçues — et les publie.
Ce choix de radicalité s’accompagne d’une culture d’entreprise alignée : Schoolcraft le rappelle souvent, “We don’t do marketing. We tell the truth in a creative way.”
Et ce « dire vrai » devient un outil de différenciation. Sur leur site, les pages ressemblent plus à un blog engagé qu’à une plateforme e-commerce. Leur section “Things we do” raconte des histoires : des portraits d’ados végans, des tests de recettes étranges, des interviews de fermiers reconvertis. On y croise aussi des vidéos absurdes, comme Last First Dates, mini-film décalé où un verre d’avoine devient prétexte à parler de vulnérabilité.
Tout est contenu. Tout est culture.
Une marque éditoriale, pas simplement produit
Oatly pousse l’éditorialisation jusqu’au bout : leur présence sur Instagram @oatly est une masterclass de ton juste. Second degré, visuels lo-fi mais pensés. C’est brut, parfois brouillon — mais c’est voulu. On parle d’environnement, de politique alimentaire, de culture populaire… et très peu de produit.
Instagram @oatly
Sur YouTube, on retrouve des vidéos poétiques, maladroites, assumées comme telles. L’anti-production de masse devient une signature. Le format “Oatly Department of Mind Control” parodie la publicité elle-même. Le message est clair : ils savent que vous savez que c’est de la com. Alors autant en jouer.
Une identité visuelle pensée comme système narratif
Le design Oatly est immédiatement reconnaissable : typographies irrégulières façon collage, aplats de couleurs naturelles, illustrations naïves. Chaque élément semble “fait à la main”, ce qui tranche avec les identités lisses du food packaging traditionnel. On est loin du minimalisme froid ou du greenwashing. Oatly ne veut pas faire bio-chic. Elle veut faire vrai.
Cette identité visuelle, signée Forsman & Bodenfors, devient un langage à part entière. Elle autorise l’ironie, la surprise, l’ultra-récit. Sur un pack, on peut lire un texte entier sur… la difficulté d’écrire un texte. Sur un autre, un avertissement : “This carton may cause feelings of planetary wellbeing.”
C’est plus qu’un branding : c’est une grammaire.
L’humour comme arme politique
L’humour est une constante, mais il est loin d’être gratuit. C’est un humour au service d’une cause : celle de la transition alimentaire, de l’environnement, de l’anticonformisme. Et surtout, c’est un humour de posture : celle qui dit “on sait que c’est compliqué, mais on essaye”.
Sur ce point, Oatly rappelle la stratégie de Monoprix : dire quelque chose de fort avec légèreté. Mais ici, la légèreté est un moyen de contourner la fatigue morale qui entoure les discours écolos.
On rit — et en riant, on adhère.
Ce que Oatly nous apprend
À l’heure où la communication des marques est souvent diluée, Oatly rappelle que :
Une marque forte, c’est une marque alignée. Pas parfaite, mais cohérente.
Le produit n’est qu’un prétexte. La vraie force, c’est le récit.
L’humour n’est pas une distraction. C’est un levier d’engagement.
La culture interne se lit dans chaque mot externe. Oatly ne joue pas un rôle : elle vit sa posture.
Pour les marques publiques et B2B
La leçon n’est pas de faire des blagues. Mais de parler juste. D’oser une tonalité incarnée, un ton clair, une forme de proximité. Même pour des sujets “sérieux”.
Pour les institutions et grandes entreprises
Il est possible d’être militant sans être clivant. D’avoir une voix, un style, un engagement. Même dans un cadre réglementé. Ce n’est pas une question de forme. C’est une question de courage.
Et vous, votre marque ose-t-elle une voix singulière ?
Si vous sentez que votre discours manque d’alignement, ou que votre stratégie de contenu mérite un vrai pas de côté, on peut en parler. Prenez rendez-vous — 30 ou 60 minutes, pour poser les bons jalons.
Les visuels utilisés dans cet article sont présentés dans un cadre éditorial.
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